Un échange entre deux humains : une femme (Sophie R) et un homme (Frédéric L) relayant la parole des deux grands artistes. Une «adaptation» est nécessaire, au sens où nous ne pouvons bien évidemment conserver l’intégralité du texte de Bernard Noël.
Pour l’instant sur le plateau de part et d’autre d’une table oblongue, dans la lumière d’Éric Blosse, les deux acteurs, leurs deux voix, leurs deux corps. Projetées sur un support qui aurait – dans ses proportions – les dimensions du Détail/Opalka, des images en mouvement, des images ininterrompues ; elles capteraient des détails d’objets : ceux d’un pinceau, d’un chiffon, d’un godet, d’un pétale de tulipe, d’une ampoule électrique, d’un câble, d’un bouton on-off, d’un grain de sable, d’une goutte d’eau, d’un morceau de charbon, d’une tache d’encre, d’un doigt, d’un rais de lumière… Images noires et blanches et grises. Lentes images d’approche et de recul. Celles-ci seraient réalisées par le jeune vidéaste Mickaël Varaniak-Quard.
Si l’œuvre de Bernard Noël fait de la poésie son principe unificateur Extraits du Corps, La Chute des Temps (Poésie-Gallimard), elle n’est nullement réductible à un genre littéraire : poésie oui, mais aussi roman, essai, théâtre, journal de voyage, critique d’art, dictionnaire…
Son amitié pour les peintres et son goût pour la peinture sont le cœur vibrant d’œuvres telles que Magritte (P.O.L), Vers Henri Michaux (Unes), Paul Trajman ou la main qui pense (Ypsilon) et tout dernièrement Un Toucher aérien – dessins de Bernard Moninot – poèmes de Bernard Noël (Artgo & Cie). Sans oublier, bien sûr Le Roman d’un être (P.O.L). Le peintre Roman Opalka a ouvert son atelier à l’écrivain Bernard Noël, tel Alberto Giacometti à son ami Jean Genet. Onze entretiens menés d’avril 1985 à février 1996 que révèle l’écriture de Bernard Noël sublimement accordée à la peinture sublimement unique de Roman Opalka.
Voici ce que le peintre écrit au sujet de son œuvre qu’il a intitulée OPALKA 1965/ 1 – ∞ entamée en 1965 – il a alors une trentaine d’années – et que sa propre mort est venue achever en 2011 : « J’inscris la progression numérique élémentaire de 1 à l’infini sur des toiles d’un même format, toujours 196 sur 135 centimètres, à la main, au pinceau, en blanc sur un fond noir recevant depuis 1972 chaque fois environ 1 pour cent de blanc supplémentaire. Arrivera donc le moment où je peindrai en blanc sur blanc. Depuis 2008 je peins en blanc sur fond blanc ce que j’appelle le « blanc mérité ». Après chaque séance de travail dans mon atelier, je prends la photographie de mon visage devant le Détail (la toile) en cours. Chaque Détail, à partir de 1968, s’accompagne d’un enregistrement sur bande magnétique de ma voix prononçant les nombres pendant que je les inscris. » Ces nombres Opalka les égrène en polonais, sa langue maternelle. Il précise : « Je les énumère en polonais, pas en français. Quand tu dis 99 en français, tu dis 4 puis tu passes par le 20, et puis tu dis 19. En belge ou en suisse tu dis nonante-neuf. Le 99 français est privé de chronologie. » 1 est le premier nombre posé par Opalka en 1965.
Distribution
Frédéric Leidgens
Sophie Robin
Scénographie et création lumière : Eric Blosse
Création vidéo : Mickaël Varaniac-Quard
Production : Collectif jesuisnoirdemonde
Coproductions (en cours) : Les Célestins – Théâtre de Lyon, Les SUBS
Accueil en résidence (en cours) : Les SUBS
Les autres projets du Collectif jesuisnoirdemonde